Fonctionnement d’un élevage d’agneaux en France

Fonctionnement d’un élevage d’agneaux en France

Nous sommes allés à la rencontre de Guillaume, éleveur de brebis en Auvergne, qui produit de l’agneau certifié IGP Elovel .

Label IGP Elovel

En France, on adore un peu trop les étiquettes ! Mais ce label est vraiment très intéressant car il ancre le produit dans un terroir ! Pour respecter le label, il faut appartenir à une zone géographique et élever une certaine race de brebis qui est adapté au climat ! C’est l’essence même de la paysannerie, faire des produits qui sont adaptés au territoire. 

Donc le label IGP Élovel de Guillaume l’oblige à produire son agneau en Lozère. Il triche un peu puisqu’il est à 20km de la frontière. Mais restons logique, ce n’est pas une frontière qui change un climat, donc cela reste cohérent avec le projet de départ qui est d’avoir des produits adaptés au territoire. De plus il élève une race de brebis rustique : la blanche du massif central, c’est une race qui peut s’adapter aux conditions arides de sa région d’origine comme à des climats de montagne plus continentaux. C’est une bonne marcheuse adaptée à l’élevage dans les parcours. Elle se désaisonne facilement et peut donc produire des agneaux à n’importe quelle période de l’année.  Il y en a 350000 en France, dont 50% des effectifs sont en Auvergne !

Ce label soumet l’éleveur à un cahier des charges très strict, assurant la qualité du produit, et pourtant, il ne sera rémunéré que 30 centimes du kilo en plus par rapport à un agneau standard. Eh oui ! Aujourd’hui, on est éleveur par passion, pas pour devenir riche !

L’élevage

Maintenant, voyons comment se déroule son élevage :

Reproduction 

Sur la ferme, chaque mère agnelle une fois par an mais le troupeau est divisé selon 3 périodes d’agnelage.  Ainsi, la charge de travail de l’éleveur est répartie car chaque naissance demande beaucoup d’investissement, et cela permet aussi de produire des agneaux toute l’année. Il y a une quinzaine de béliers qui s’occupent des 250 brebis, sans aucune insémination artificielle. Après il faut juste s’assurer qu’il n’y ait pas de consanguinité et assurer un turnover avec les béliers.

Naissance

Après les 5 mois de gestation, les agneaux naissent au fur et à mesure dans la bergerie mais aussi dans les pâtures, qui sont toujours sous la vigilance de l’éleveur car les brebis en gestation sont beaucoup plus vulnérables aux prédateurs sauvages. En moyenne, une brebis obtient une portée de 1,6 agneaux. 

Quand une brebis fait plus de 1 agneau, elle rencontre davantage de difficultés pour prendre soin de tous ces petits, c’est alors que l’éleveur améliore les chances de survie des agneaux. En moyenne sans intervention, 30% des agneaux ne finissent pas leurs jours normalement, alors que le taux de mortalité descend à 6% avec tous les soins de l’éleveur. A chaque naissance, on vérifie que l’agneau a bu le colostrum, premier lait de la mère renforçant le système immunitaire. Il reçoit une injection d’un complément de sélénium augmentant sa résistance face aux agents pathogènes et il se fait aussi boucler selon les normes françaises pour la traçabilité du produit. Quand la brebis n’a pas assez de lait pour tous les agneaux, ils seront complémentés par l’éleveur au biberon, qui peut passer jusqu’à 3 heures par jour en période d’agnelage. 

Retour au troupeau 

Les agneaux restent dans un enclos quelques jours avec leur mère pour renforcer le lien maternel avant de rejoindre de nouveau le troupeau.

Gestion du troupeau

Les chiens sont souvent utilisés pour garder les brebis, leur instinct de prédateur permet de conditionner les animaux proies à obéir, cependant, le chien est dressé à ne pas mordre. Les brebis sont dehors le plus souvent possible en été et rentrées pour leur sécurité la nuit.

Alimentation 

Les agneaux sont nourris au lait de leur mère pendant les trois mois d’élevage. Toute l’année, le troupeau est complémenté en minéraux (phosphore, calcium, vitamines…) pour compenser les nutriments qui manquent dans le sol spécifiquement dans cette région et pour limiter la mortalité, toujours plus élevée en milieu naturelle. N’oublions pas que certaines espèces animales des montagnes comme le bouquetin risquent leur vie pour espérer obtenir quelques minéraux (exemple en vidéo), l’éleveur ne fait que faciliter la vie de la brebis qui n’aura pas besoin de risquer sa vie pour se nourrir.

En été, les animaux mangent de l’herbe la journée dans les pâtures et du foin le soir.

En hiver, ils ont de l’ensilage d’herbe, du foin, des céréales et du tourteau de colza pour rééquilibrer en protéines la ration alimentaire. Ils ont aussi de l’enrubannage, c’est une herbe conservée sous forme de ballot avec un certain taux d’humidité, c’est le même principe de fermentation que pour faire de la choucroute !

La tonte 

Contrairement à l’idée que l’on pourrait avoir, les éleveurs ne s’enrichissent pas grâce à la laine des moutons. La tonte est même un coût supplémentaire pour l’éleveur qui dépense davantage à les faire tondre qu’à revendre la laine. Les antispécistes qui voient la tonte comme une exploitation de l’animale ne comprennent pas qu’elle est faite avant tout pour le bien-être de l’animal, qui sinon risquerait d’étouffer de chaleur mais aussi d’être parasité.

Les difficultés du métier de berger 

Avec le réchauffement climatique provoquant des températures de plus en plus extrêmes, les récoltes sont de moins en moins bonnes. Cela porte préjudice au système économique de l’éleveur qui doit faire plus souvent appel à des ressources qu’il ne produit pas lui-même afin de compenser le manque. Cela met les éleveurs dans des situations de stress élevé, sachant qu’en plus, ils n’ont pas le droit au repos, puisqu’ils doivent prendre soin de leurs animaux tous les jours !

Prédateurs naturels 

Le loup fait son retour en France, il tue des milliers de brebis par an, ce qui soumet les troupeaux à d’importants stress et on reproche aux éleveurs de vouloir, non pas exterminer tous les loups, mais défendre leur troupeau. Les clôtures et les chiens ne suffisant pas à défendre efficacement de toutes les attaques face à des animaux rusés et qui n’ont plus peur de l’homme.

Berger fait partie malheureusement d’un des rares métiers où la défense de ses intérêts vis-à-vis de la faune sauvage est très mal vu. En effet, personne n’irait remettre en question la nécessité de réguler des sangliers après des dégâts de culture à répétition, ou encore la destruction d’un nid de guêpes qui porte atteinte à la sécurité des habitants d’une maison. Dernier exemple, des rats qui envahissent la ville doivent être exterminés pour des raisons évidentes.

Soyons un peu plus compréhensif et à l’écoute avec les bergers qui élèvent des animaux en extérieur, qui font tout pour le bien-être animal, pour qu’à la fin, on ait des produits de qualité. Je vous conseille d’ailleurs de suivre les aventures de cahiers de berger, qui avait faire une réponse à Hugo Clément quand il s’attaquait justement aux bergers !